vendredi 24 février 2017

LES LETTRES DE LA NUIT 3 et 4.



LES LETTRES DE LA NUIT – version revisitée 2017.
3/1.
Plus de nuit. Après les jours et le dernier jour… Un globe de terre sans nuit. Achevées les nuits. Donc annulés aubes et crépuscule. Plus de jour aussi ! La clarté dans les ténèbres. Il est urgent mais peut-être trop tard désormais que l’art (re)devienne la dérisoire bagatelle qui élimine les certitudes prétentieuses. Reconquérir la Poésie ordinaire… Une paire de ciseaux, des bâtons de colle, des prospectus touristiques, des vignettes postales… Découper, assembler, détourner. Ecrire sur des vieux cahiers d’écolier récupérés dans les fonds des tiroirs de l’enfances, des poubelles de l’adolescence.
Je ne crois plus aux oriflammes, ni aux noms des saints dans l’almanach. La relecture de CADAVRE GRAND m’a raconté : Anthologie de la poésie des fous et des crétins du Nord de la France d’Ivar Ch’Vavar et quelques autres Camarades m’a rappelé le trouble émoi qui subsiste en ma chair depuis Août 1995 quand j’ai découvert les toiles de Francis Bacon lors de d’une exposition à la fondation Maeght. Grise pluie fine picarde, courir dans sa tête sur les chemin des sommets des monts des Flandres avec Arthur, mon père, qui me suit, avec du ravitaillement, en vélo-tout-terrain. Délivrance, mais éphémère. S’abrutir de lecture, de Jean Bodel à James Lee Burke et aussi Ken Buren, tout en écoutant l’improbable mais réel  blues wallon d’Elmore D. de Liège.


4/1.
Ils vont affirmer : ‘ Pour Icelui CELA a l’air de s’aggraver ! ‘. Icelui s’est réfugié près du lac de Drennec. Il s’attache quotidiennement à en courir le tour. La vieille fermette rénovée est nichée au bout d’une voie en cul-de-sac, à l’entrée de laquelle on peut observer un calvaire au Christ au regard particulièrement inquiet, il épie, scrute la ligne des mots d’Arrée en bredouillant :  ‘…Différents, NOUS avons tous le même rêve… éveillé. C’est peut-être ce qui nous fait… différents, NOUS avons tous le même…’  Ici, Icelui [Il y a plus de 20 ans, il se nommait encore Kristen Ethan, a trouvé asile. Provisoirement autour du Lac de Drennec, il court encore, il renifle le cul de la Bretagne intérieure, s’allonge, s’étire dans la fange qu’offre la pluie quand elle daigne s’éparpiller dans la forêt d’ Huelgoat – Ici ou là, ici et là.


ELLE ! Icelle, à cette époque de plus de 20 ans ! est plutôt l’absente et la différente que j’attends en la nommant Fidéline Hayures. NOUS avons tous le même cauchemar… éveillé. (Là-bas, Fidéline Hayure est meurtrie… au bas ventre… c’est la lacune d’amour, elle a appris cette solitude sous les bouts de ses doigts. Elle sait aussi que quelque part dans sa cellule, un condamné à mort se mutile………….Incision Dans Le Macadam.)
Je peux pleurer, ça ne sert à rien de pleurer. Je sais. Vous m’attendiez. J’ai reconnu tout de suite ces lieux où à tour de rôle vous m’aviez convié et où je n’étais jamais allé. Je peux chanter, ça ne sert à rien de chanter. Je sais. Vous me convoitiez. J’ai trouvé de suite les rues où vous avanciez. Je peux prier (ou regarder la télévision), ça ne sert à rien de regarder la télé (ou de prier). Je sais vous m’attendiez mais je ne pouvais pas vous suivre.
À Pleyber-Christ, au supermarché, Guenièvre, j’ai croisé. Ensorceleuse comme à son habitude, quand elle m’a convié à prendre place dans son petit véhicule, elle jubilait. Plus tard nous avons encore glissé jusqu’à la décharge public de Kommana, des tonnes de sacs d’ordures se consumaient dégageant une puanteur de dieux en décomposition. Elle m’a alors soufflé au creux de l’oreille : ‘ Tu vois, ici, c’est pareil ! On s’arrange comme on peut ‘. Au matin, j’ai entendu s’élever le soleil – J.S Bach – suite n°3 in D minor. BWV 1068 ‘Air’ – CELA m’a réveillé, j’avais les mains bleues, au loin dans le ciel on pouvait encore observer une cabine téléphonique disparaître. J’ai su alors que Guenièvre n’était pas Guenièvre.

LES PIERRES D’HUELGOAT

                                                                   Elles ne parlent pas, ni offensent                                                                                                                                   Dans les vents qui chantent au pourtour,                                                                                                                              Témoignent de la mort, de l’amour,                                                                 Elles mordent nos ignorances

dimanche 19 février 2017

LES LETTRES DE LA NUIT - 2/1.



LES LETTRES DE LA NUIT 
– Version revisitée 2017[suite du 19.01.2017]

2/1.

Baîllements, enfin exténué, éreinté, brisé, trouver tout de même le sommeil, malgré une exacerbation extrême : celle d’une agitation nerveuse accrue ; l’élancement de l’abandon de la mère tracé sur la peau ; pire que les injures et les médisances, l’indifférence insufflée jusqu’à l’os. Dans la ‘ CELA ‘ hulule, de derrière la vitre de sa chambre, il guette, puis fixe l’oiseau de proie nocturne. Une ombre espérée, celle de Mimosa Incandescente, devient palpable. Invisible, Icelle rend visite au corps de Caillou de sable blanc. À même le sol, recroquevillés dans la promiscuité de leurs absences mutuelles, ils décèlent tout de même les mains secrètes nécessaires à leurs caresses. Offrandes et offenses, encore et toujours. Ils s’useront les lèvres de baisers jusqu’à plus la brulure de la morsure de leurs absences ! Morsures, griffures de solitude enivrantes ‘ Copernic qui soul’t din tin amiclot’mint ! ‘,  une complainte, un poème remonte de la gorge. Pour lui un espoir bleu, idéal, s’efface, comme mort ce matin. Persiste, au plafond, appliquée, une vision en miettes, écartelée, distordue. Cartilages écrabouillés sur le sol du plancher aussi… et encore sur l’âme tremblante, convulsée, hallucination de terroirs et de peuples qui pourraient enfin délaisser l’errance de leurs langues rentrées, avalées, digérées, évacuées en petits amas de substances honteuses. De ces agglomérats fertiles, à nouveau choyés, honorés, émergerait(aient) Poésie(s).
Ah ! Si l’homme, ce prétentieux agneau qui joue au singe de Dieu, savait transmettre à sa progéniture la sève essentielle, des langages ne seraient plus en train de pourrir dans les grognements vulgaires des papes et de leurs généraux serviles qui trompettent à « tue-ton-voisin » l’air vicié du fiel puant les certitudes du conservatisme-traditionaliste. Seul dans la crèche, un morceau de sucre peinturluré, afin que la foule patiente. Alors lui est volé le destin de son unique étoile. 

Illustration : Le trait des Anges par Leelou Déquesnes.
Photo : Icelle.

jeudi 16 février 2017


COMME DANS DES SOUTERRAINS À LA DOSTOÏEVSKI – suite –



[…] il eut aimé dire quelque chose, cet homme sombre dans son cœur sombre. Il eut aimé dire quelque chose : "ce siècle ...."  - Mais les mots picorent les mots et les mains brisent les mains.
                                                                                                                              Orage,  orage
                                                                        des araignées noires lacèrent sa poitrine béante.

                                                                           Dusan Matic – 1898-1951.
Sans cesse la mer recommencée… -part 1.

Dans le corridor de ma fourbe souvenance – tunnel oblique de la chair - , mon existence est une longue nuit d’insomnies. S(a)igné : Le Voyant-du-Chêne. CELA, long et mélancolique, en sur-romantique bleuNUIT, verse l’or des larmes de Lucie. Sans cesse, la Mer recommencée… l’ïles de Groix, Wissant, Brighton, Berck-Plage, Middlekerke, Swansea, Cloghane… Sans cesse la Mer recommencée…                                        
L’eau entraîne les roues des moulins décrépits. Derrière la grille rouillé du puits des insomnies, d’invisibles revenants – fripouilles visions insolentes de ceux qui ont disparu- me serrent les pognes. Charpenté en pierre, un satirique Christ statique au carrefour d’Audinghem poursuit sa vaine mission rédemptrice qu’il pleuve, qu’il vente, sous le soleil, sous les flocons de neige. La parure bleuNUIT et jaune-fauve du ciel assombri est tombé sur l’animalité des terres. Les ondes radio égrainent au travers les cieux leurs imbéciles programmes nocturnes.

-        La scène se déroule dans les lignes de solitude de leurs rêves –
Icelle : ‘ je travaille maintenant à la boulangerie de ma cuisine ‘
Icelui : ‘Toudi chéle Mèr àrkëminchée* ‘

Bientôt, errant à nouveau,  d’un pas tranquille  le long d’une plage, j’interroge notre histoire : Picardia, de nos retrouvailles suis-je le cancrelat ?  Face à la Mer du Nord, esseulé, de moi-même je ne suis plus qu’une contre-vérité face au carrousel de l’Amplification des Ampleurs des Aggravations – la scène à l’identique à déjà eu lieu, il y aura bientôt quarante ans. Je suis un vieux pieu nu planté sur une plage. Sans cesse la Mer recommencée… Des improbables chevaux de mer surgissent des lointaines falaises de Douvres ; ils ont des crinières d’écume blanche, à marée haute ils s’écrasent contre les rochers de la plage d’Audresselles. Demain, à Brighton, je vais traînailler. Déjà j’avance en flânant vers la fête foraine flottante pour m’égarer dans le musée de la teigne de ma jeunesse rebelle. À Brighton, sans cesse la Mer recommencée…
À suivre…
*traduction française : Sans cesse la Mer recommencé...


dimanche 5 février 2017

L’ A.A.A’s [L’Amplification des Ampleurs des Aggravations]                                                                avec les participations de Josiane Bartazeau, Luis Piglou et quelques autres

À la mémoire de Jean Yanne


Ma très Josiane.

Je vous transmet, ce jour, une curieuse lettre ed min vius Caùmarade Edzyh que j'ai retrouvé dans l'un de mes tas d'archives. Je crois qu'elle devrait vous plaire.

À vous lire, bientôt peut-être ?

Luis Piglou.

1/1. Comme dés de lettres, des hannetons à damiers roulent…  
Ma peau, voile, durant 10 jours.     
                                            
TOUDI SU L’COECHIE – pré-histoire.


Poèmes collés./ Dans une ville rose, jadis, j’ai plié mon ombre./Les bien-pensants affirment que tout fini toujours par rentrer dans l’ordre – rien n’est moins sûr - ./ Voici l’âme creuse./ Sur Queen Street à la verticale un homme les pieds élevés vers le ciel. Il a son crâne au fond du vide d’un seau noir ‘ Could you spare a penny ? ‘./ C’est l’histoire de perdre sa vie – d’autres diront qu’il faut la gagner – ‘ Oes gennych chi dipyn o arian dros ben ? ‘./ Afin de subsister, apprivoiser les spermes noirs de mes complications de textes./ Tentatives de détournements d’écritures pour ‘comme Francis Bacon peignait’./ La nuit, la rouille de ma vie me réveille. Je la cautérise : c’est courir entre le jour et l’autre jour, de Caerdydd à Pernarth./ Cette personne – comme son fils – était une pierre trop froide. Un cœur ? Pourtant pas morte !/ Le soleil de l’esprit replie ses paupières sur la frange de la dernière page./ J’aime finir la lecture d’un livre avec la certitude que j’y retournerai./ Pour toute son existence, le nez brisé, un jeune type déambule sur St Mary Street. Sous le pont, il est beau aussi, pour toute sa vie./ Pour une vie encore, une jeune femme – visiblement d’origine indienne – passe sous la passerelle de Dumfries Place. Elle tient les bouts de ses doigts dans une autre main./ À Penarth il pleut des falaises de craie tranchantes./ Sur le monticule ‘ Grangetown Rubbish Tip Park ‘ la maigre ortie soyeuse rôde pareille à une couleur absente – celle que l’on omet toujours de rendre à l’arc-en-ciel./ Puis des destriers peupliers écartelés./ Couvertes de varech, des roches brunâtres sur la plage se suspendent avec déterminations à l’éternité. Elles gisent dans le BANG ! de la création avant d’exploser, d’éclater en myriades translucides telles des millions de minuscules et invisibles têtes d’épingles./ Et des étoiles seront… / Près d’un distributeurs de billet de banque, une jeune fille pleure avec retenue. Son décolleté est attachant empli de petit hoquets timides et de sanglots discrets, émouvants. C’est sur Albany Road./ Les soldes – ici comme ailleurs [c’est partout !] ne sont plus ce que CELA était./ Un désir m’invente une odeur qui n’existera peut-être jamais plus. C’est le parfum de La Flor d’Avalanche. C’est une prière que je me récite à moi-même./ Complice, des hannetons à damiers roulent comme dés jetés. Ils tracent des partitions baroques sur le parchemin cérébral de mes souvenances./ Les salaires ne sont plus ce que CELA coûte en travaux./ À Cwmbrân – la vallée des corbeaux – j’ai jadis admiré ‘Orage s’approchant’./ Route de retour vers Caerdydd. Carlos mon guide, mon Rodin in Cymru./ Mon front ensangloté posé au creux de tes genoux. Voilà l’amorce de mes visions. Déjà, Avalanche ne te retourne pas. Pour toi je suis aux spectres gallois et avec toi./ Le doigt du hasard NOUS a désignés. Mais que se passe-t-il ? Ne posons plus ces tortures qui NOUS autocensurent./ Acheter à Spillers – definitely the oldest record shop – ‘ Down in the Valley ‘ by THE HANSOME FAMILY – ‘ A treasury of their most willowy & haunted songs.’/  


Un trésor de leurs chansons les plus hantées et inspirées comme une bande-son parfaite à cette absence… / J’écoute la ritournelle de nacre comme  ‘ encore en apesanteur – weightless again ‘. /   Poèmes papiers collés. Dans la cité du Dragon rouge – Caerddydd – j’écoute la complainte de nacre. / À Brigend j’ai déjeuné du saucisson de Berguette et visionné la vidéo ‘ Spanish Dance Troup ‘ des Gorky’s Zygotic Minci – 


Un autre temps dans la maison de Carrys et William./ J’attends que tu me dessines à ton tour l’autre lettre. / J’entends au loin de ma mémoire la Musique de John Cale [for Nico & Andy] et la voix du Chien de Laugharne. / En deuil, cette chanson de nacre s’ouvre, s’offre, souffre, creuse… / …une coupure de presse, une photo au fond du portefeuille. Là, au cerveau, il y court toujours. / À Swansea, j’ai marché sur les quais autour du port cher à Dylan Thomas. Plus tard j’ai  ‘collé ‘ un ‘poéme’. / Sur les rives de notre couche, hachée ta dentelle délicate. / Ton jus d’oranger perle de sous ta jupe d’Italie. / Là, un petit jardin où tu y cueilles pommes. / C’est une bien forte longue attente singulière. Un vœu ? / Sur The Hayes, voilà, de 1894, la plus ancienne boutique de disques que je connaisse. / Oh ! Les grévistes… J’avais douze ans !  - comprends pas ! – Les syndicalistes ont abandonné mon père. / Je me moque des poètes militants. / I’M A FROU-FROUC-PLOUC ! / Puis je l’ai regardé, le père, pleurer. Quand nous les prolos on veut informer le reste du peuple – tracts et banderoles. Et quelques mégaphones – on NOUS pourchasse. / Je fuis les slogans. / NO DESIGNATION ! NO RESIGNATION ! / Et bâillons. / Vous ! Belles puissances, pourriez-vous un peu lui prêter un peu attention à l’âme creuse ? / Il y en a trop ! Musiques ! [réécrivez dans votre mémoires tous ces poèmes que vous avez vraiment lus car vous vous sentiez alors tellement vivant. Réécrivez et PASSEZ AINSI DE L’AUTRE CÔTE ! / Et si CELA tout de même voulait dire quelque chose ? / À venir il me reste un poème-tableau-collage ambulant à terminer. / Sac plastique PLASTIC FISH & FISH. / Cartes magnétiques ramassées au sol, sur des trottoirs. Etiquettes de bouteilles de bière. Tickets d’hiver – aux abords du grand stade - / Sachets de condiments pour soupe asiatique lyophilisées ‘ Why not try adding a handfuf of mushroom slices ‘ . /  Le voile recouvre le corps, le protège encor./ Dix journés, voile de vie in Cymru. / Holy-ten-days in Wales. / Le voile l’emporte. / etc… / Même s’ils n’ont pas tort certains chercherons encore longtemps le langage parfait ; mais il n’y a plus qu’à attendre l’autocar.

                                                                                                                             South Wales - 2001.
                                                                                                           Christian-Edziré Déquesnes